Lina Khan, présidente de la Federal Trade Commission (FTC), l’autorité de la concurrence américaine, s’est fait connaître en 2017 par un article remarqué sur les pratiques monopolistiques d’Amazon. Ce 26 …
Lina Khan, présidente de la Federal Trade Commission (FTC), l’autorité de la concurrence américaine, s’est fait connaître en 2017 par un article remarqué sur les pratiques monopolistiques d’Amazon. Ce 26 septembre, l’institution qu’elle dirige a formellement porté plainte contre le numéro un de l’e-commerce.
« On ne voit pas beaucoup d’étudiants en droit publier des recherches juridiques révolutionnaires »
En un article, publié quelques mois avant ses 28 ans, Lina Khan est passée du statut d’étudiante parmi d’autres à celle de superstar de l’obscur monde du droit de la concurrence. En une centaine de pages parues dans l’édition de janvier 2017 de la revue scientifique Yale Law Journal, la jeune femme d’origine londonienne a fait voler en éclat un consensus existant depuis les années 70 autour de la réglementation antitrust américaine.
« Le paradoxe antitrust d’Amazon » a été décrit dans un portrait du New York Times, un an plus tard, comme un best-seller du secteur avec près de 150 000 visites. Il lui a valu d’être présente à la 34e place de la liste annuelle de Politico sur les personnalités ayant amené des idées influant le débat politique. À ses côtés, la star du late-show d’ABC Jimmy Kimmel, l’actrice Meghan Markle, qui a donné toute sa place à la culture afro-américaine lors de son mariage avec le prince Harry ou encore l’inévitable Donald Trump.
Dans cet article, celle qui devient en 2021 la plus jeune présidente de la FTC, remet en cause l’idée que la politique antitrust doit être basée sur le « bien-être du consommateur », autrement dit, les prix bas. Amazon y est désigné comme une illustration « élégante » sur le pouvoir d’influence sur le marché des grandes plateformes du numérique.
Ce succès public a multiplié les portes qu’avait déjà ouvertes l’étudiante d’alors. À Washington, elle a travaillé comme conseillère de la sous-commission antitrust de la Chambre des représentants. Elle y a enquêté durant 16 mois sur les plateformes en ligne et plus particulièrement sur le dossier Google, sur des thématiques similaires aux poursuites auxquelles doit répondre l’entreprise actuellement.
Avant cela, à partir de juillet 2019, Lina Khan a commencé, formellement, à fréquenter la FTC. Cette fois en tant que conseillère du commissaire démocrate Rohit Chopra. Ce dernier avait déclaré à l’époque au New York Times, « On ne voit pas beaucoup d’étudiants en droit publier des recherches juridiques révolutionnaires ou des recherches qui ont eu un impact aussi profond aussi rapidement ».
Lina Khan en symbole
Ensemble ils tenteront d’étendre les pouvoirs de la FTC, en élargissant l’interprétation de l’article 5 des règles de l’agence, interdisant les « méthodes déloyales de concurrence ». Un combat repris par Lina Khan deux semaines après son arrivée en tant que présidente. C’est en partie sur cette base que l’antitrust américain mène son affaire contre Amazon.
L’entreprise ne s’y est pas trompée. La même semaine de l’été 2021, le groupe d’e-commerce a déposé une requête pour contraindre Lina Khan à se déporter des dossiers le concernant. Motif invoqué : « elle a soutenu à de nombreuses reprises qu’Amazon est coupable de violations antitrust et devrait être démantelée ». L’initiative n’aboutira pas.
Si Lina Khan n’est pas seule au sein de la FTC, outre les quatre autres commissaires, un bataillon de fonctionnaires se charge de monter les dossiers. Elle incarne toutefois, depuis sa nomination par Joe Biden la fermeté de l’administration démocrate face aux plateformes numériques.
Pour le moment, les tentatives de mettre des bâtons dans les roues des Big Tech se sont heurtées à des défaites devant les tribunaux. Le cas Amazon, lancé dès 2019, pourrait, avec Google, signer la réussite ou l’échec des démocrates dans le domaine. Une nouvelle déconvenue serait symbolique pour Lina Khan. Elle pourrait aussi lui donner raison sur la nécessité d’actualiser les lois antitrust américaines du début du XXe siècle.
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