Au sein de l’Union internationale des télécommunications (UIT), agence affiliée à l’ONU, la Chine a présenté et soutenu son protocole d’adressage, outil à la base de la majorité des communications …
Au sein de l’Union internationale des télécommunications (UIT), agence affiliée à l’ONU, la Chine a présenté et soutenu son protocole d’adressage, outil à la base de la majorité des communications sur internet, qu’elle souhaite généraliser. Selon Pékin, en exploitant ce protocole, les états « maîtriseraient davantage leur réseau ».
Pékin / Washington : tensions autour de la gouvernance d’Internet
À l’heure actuelle, IPv4 reste toujours le protocole utilisé sur le Net. Néanmoins, ce réseau est saturé car limité à 4,3 milliards d’adresses internet à 32 bits. Ainsi, l’UIT réfléchirait à passer au protocole IPv6, quatre milliards de fois plus vaste que IPv4 car utilisant des adresses 128 bits.
L’Internet Engineering Task Force (IETF) est à l’origine de IPv6, qu’il a mis au point il y a maintenant 30 ans. Néanmoins, pour qu’il puisse être utilisé sur Internet, il doit être modifié pour faire face aux milliards de connexions mobiles, au très haut débit, aux diverses cybermenances, et à ses utilisations toujours plus poussées en lien l’intelligence artificielle ou l’internet des objets. Des paramètres qui n’existaient pas durant les années 1990.
Pour pallier à ça, la Chine a développé son propre protocole, IPv6 Enhanced (IPv6+). Le pays a pour ambition d’utiliser pleinement IPv6+ d’ici 2030. La superpuissance asiatique cherche désormais à convaincre plusieurs pays, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, de se tourner vers son protocole, et ainsi obtenir une majorité d’adeptes. Si l’UIT venait à approuver l’usage de IPv6 +, la Chine pourrait renforcer la mainmise sur son réseau en toute liberté.
Malgré tout, dans sa tentative de coiffer au poteau Washington avec qui elle est en rivalité sur la question, Pékin doit faire face à plusieurs difficultés. Alors qu’un ressortissant chinois, Houlin Zhao, était à la tête de l’UIT depuis 2015, l’organe de l’ONU spécialisé dans les télécoms est désormais dirigé depuis le début de l’année par Doreen Bogdan-Martin, une ingénieure et diplomate américaine. Certes, l’influence de la Chine subsiste, notamment portée par son milliard d’internautes, un record mondial. Néanmoins, avec le temps, le gouvernement chinois craint que sa position ne s’estompe.
En parallèle, les opérateurs télécom historiques européens, tous réunis dans l’association ETNO, sont contre l’utilisation du IPv6+, mais aussi contre tout protocole émanant d’un état. Pour les membres de ETNO, dont font partie Orange, Deutsche Telekom, BT ou encore Proximus, « les protocoles Internet et leur architecture devraient continuer à être développés de manière ouverte, multipartite et ascendante, comme ceux dirigés par l’IETF et l’Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE), et non pas par des processus descendants, comme à l’UIT ».
Enfin, le protocole IPv6+ a été promu au début de la décennie par le géant chinois des télécoms, Huawei. Depuis plusieurs années, ce groupe est au centre des sanctions américaines visant la Chine, ce qui pourrait nuire à la crédibilité de IPv6 Enhanced qu’il a mis en avant. À noter qu’Huawei est également membre de l’IETF. L’Empire du Milieu compte bien sur sa présence au sein de cet organisme pour faire pencher la balance en sa faveur.
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