Sur le réseau social chinois WeChat, Zhangjiang Group, une société d’État chargée de l’exploitation immobilière et des investissements de la Cité des Sciences de Shanghai, a annoncé le 19 décembre …
Sur le réseau social chinois WeChat, Zhangjiang Group, une société d’État chargée de l’exploitation immobilière et des investissements de la Cité des Sciences de Shanghai, a annoncé le 19 décembre un progrès significatif dans le domaine des équipements de fabrication de semi-conducteurs. La publication a depuis été corrigée pour devenir beaucoup plus vague.
Le flou en 28 nm
Dans le riche écosystème des semi-conducteurs, l’une des faiblesses significatives de la Chine dans sa course à l’autonomie est sa capacité à fabriquer des équipements de production de composants. Shanghai Micro Electronics Equipment (SMEE), dont l’un des actionnaires est Zhangjiang Group, est l’entité chinoise la plus en pointe dans le domaine. Selon Bloomberg, sur WeChat, Zhangjiang Group a proclamé, parmi une multitude d’autres réussites, que SMEE est parvenue à développer une machine de lithographie utilisée pour graver des puces avec des processus de 28 nm.
Il s’agit d’un nœud de production mature, loin des capacités des meilleurs équipements pouvant produire des puces en 7 nm, 5 nm, 3 nm. Cela reste une performance tant ces outils sont complexes. Auparavant les machines chinoises faisaient du 90 nm. Ces puces matures sont par ailleurs toujours utilisées dans les produits électroniques.
La date de cette publication n’est d’ailleurs pas anodine : le 19 décembre 2022, le département du Commerce américain publiait le placement de SMEE sur l’Entity List, liste noire. Parvenir, sans technologies américaines, ou avec un accès limité, à un tel niveau relève également de la performance. C’est un moyen d’insister sur l’inefficacité des mesures américaines de restriction à l’export dans le domaine des semi-conducteurs depuis un peu plus d’un an.
Seulement voilà, lorsque Siècle Digital a consulté la publication de Zhangjiang Group, impossible d’y retrouver une référence au 28 nm. À la place, il est sobrement indiqué « Shanghai Micro Electronics s’engage à développer des machines de lithographie avancées ». D’après Bloomberg, la mention a été supprimée sans explication.
L’enjeu de l’autonomie de la Chine dans le secteur des semi-conducteurs
Ce n’est pas la première fois que la machine de lithographie de SMEE est évoquée dans la presse. Début octobre, Securities Daily, un média économique chinois autorisé, avait dévoilé que la fameuse machine devait être livrée pour la première fois avant la fin de l’année. Un retard sur le plan initial, qui visait plutôt 2021. Le développement et la production auraient été retardés par les mesures américaines.
Malgré ce qui ressemble à un raté de communication, les progrès de l’entreprise chinoise sont une bonne nouvelle pour l’autonomie de la Chine en matière de semi-conducteurs. C’est un premier pas pour combler un retard significatif. La première machine au monde capable de produire en 28 nm a été livrée en 2011.
Les grands fondeurs de l’Empire du Milieu, la Semiconductor Manufacturing International Corp (SMIC) et Hua Hong Semiconductor se fournissent en machine essentiellement grâce à l’import, chez Tokyo Electron et ASML pour citer les plus connus. Toutefois, sous l’influence américaine, le Japon et les Pays-Bas, pays d’origine des deux groupes, ont limité l’export de ce type d’équipements. Le but de Washington est de bloquer la Chine à 14 nm. Huawei et SMIC ont toutefois déjà prouvé que cette difficulté était surmontable, mais jusqu’à quel point ?
SMEE apparaît comme une solution future, si elle finit par confirmer ses progrès. Mais les niveaux technologiques de ses concurrents occidentaux sont encore lointains. La conception de l’équipement le plus avancé du marché, la lithographie extrême ultraviolet (EUV), dont la Chine est privée, a coûté à ASML 6 milliards d’euros de recherche et développement et 17 années de travail avant d’aboutir.
Même en bénéficiant de l’exemple des précurseurs et des investissements gargantuesques de Pékin, un tel appareil représente 457 329 composants selon le chiffre donné par Chris Miller dans son livre Chip War. Le reproduire et se fournir, hors de portée des restrictions des États-Unis, reste une gageure.
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