Economie circulaire, économie de l’usage… : les pistes pour décarboner le retail

Written by moonsjok

novembre 19, 2021

L’explosion du commerce en ligne à la faveur de la crise sanitaire pose de nouveaux défis pour les retailers. Dans ce secteur, l’optimisation de l’efficacité opérationnelle devrait aller de pair avec la mise en place de pratiques responsables attendues par un nombre croissant de citoyens. Entre réduction de l’empreinte carbone des livraisons et essor de l’économie circulaire, plongée dans le retail de demain.

Dans l’histoire du commerce de détail, il y aura eu, de manière très nette, un « avant » et un « après » Covid. À la tête des activités conseil et marketing retail chez Atos, Terry Lobel estime qu’« on a fait en moins d’un an un bond d’au moins cinq ans en avant en termes de digitalisation ». Une progression particulièrement fulgurante dans le secteur alimentaire, (+43% en 2020, contre +18% pour les livraisons non alimentaires), dont l’un des signes apparents est l’émergence brusque de startups spécialisées dans la livraison de courses en moins d’un quart d’heure, à l’image de Cajoo et Flink.

Emballages réutilisables et modèles d’abonnement : se défaire de l’économie linéaire

Une tendance de plus en plus forte au sein du retail : aller chercher les bonnes pratiques du côté de l’économie circulaire. En effet, concernant le packaging, les solutions pour réduire la quantité de ressources utilisées grâce au réemploi ne manquent pas. Spécialisée dans le transport de colis entre particuliers, la startup LivingPackets a par exemple mis au point un emballage connecté, The Box, réutilisable jusqu’à mille fois. Celui-ci assure un suivi en temps réel de l’envoi du colis grâce à des capteurs, tout en garantissant un service encore plus sûr, selon la jeune pousse, que les livraisons traditionnelles. Moins high-tech, la solution de Hipli consiste à renvoyer l’emballage spécialement conçu (en fibre de textile recyclé) une fois le colis reçu. Bilan des courses : -83% d’impact carbone en moins, assure l’entreprise.

D’autres acteurs du retail ont appliqué cette philosophie non pas (seulement) aux emballages, mais aux produits eux-mêmes. Qu’il s’agisse de vêtements à louer (testé entre autres par H&M ou proposé par le closet) ou d’appareils électroniques (comme le propose Mobile Club), des offres d’abonnement ont émergé là où les consommateurs avaient été habitués à la possession. Avantage de cette « économie de l’usage » ou de la « fonctionnalité » ? Une réduction du gaspillage et une flexibilité plus grande pour le client, qui séduiraient tout particulièrement la génération Z : aux Etats Unis, 90% des jeunes consommateurs utilisent de tels services d’abonnement.

Sans oublier la vente de produits d’occasion ou reconditionnés, qui dépasse désormais la sphère du commerce entre particuliers popularisé par leboncoin ou Vinted. Certaines marques, comme Decathlon, proposent désormais des produits de seconde main dans leur catalogue tout en encourageant leurs clients à revendre leurs produits de cette marque. Une boucle vertueuse qui permet à la fois de cibler une nouvelle clientèle (en rendant l’accès à certains produits plus accessibles) tout en créant un relais de croissance durable.

Au-delà d’un allègement de leur empreinte environnementale, les acteurs du retail ont donc tout à gagner à investir dans l’économie circulaire, y compris d’un point de vue économique.

Selon la fondation Ellen MacArthur, faire passer seulement 20% des emballages plastiques à usage unique par la case « réemploi » représenterait une opportunité de développement de dix milliards de dollars.

Last Mile Delivery et « orchestrateurs de livraisons » : en route vers la décarbonation

Une logistique rapide, sûre et efficace, mais aussi responsable d’un point de vue environnemental : les attentes en matière de livraison se font de plus en plus fortes. Pour y répondre, certains acteurs du retail, comme Monoprix, misent sur les « dark stores », ces supermarchés sans clients entièrement dédiés à la vente en ligne. L’objectif : implanter les stocks au plus près des clients et ainsi raccourcir le temps (et l’empreinte carbone) de transport. « Cela permet d’éviter les difficultés rencontrées par les magasins traditionnels », commente Terry Lobel en évoquant «une superficie importante qui coûte cher, un dispositif de maintenance qui demande du personnel… »

Ce rapprochement entre la marchandise et les clients ne résout cependant pas tout à fait le casse-tête du « dernier kilomètre ». En raison du nombre important de points de distribution (les domiciles des clients), la logistique de cet ultime chaînon, particulièrement complexe et coûteuse, est accusée d’aggraver les embouteillages et la pollution en ville. Face à ce constat, des alternatives plus douces émergent pour associer optimisation et décarbonation, c’est le cas de la startup lilloise Woop lancée en 2018, qui a rejoint cet été le programme de l’accélérateur Atos Scaler dont la moitié des startups proposent des solutions de décarbonation. Woop se présente comme un « orchestrateur de livraison », et centralise sur sa plateforme plus de cent cinquante transporteurs nationaux, locaux et écologiques afin de permettre à ses clients de choisir la meilleure option en fonction de leurs critères personnels (coûts, délais, empreinte carbone…) Dès lors qu’elles s’avèrent réalisables, notamment sur de courts trajets, les offres de mobilités douces comme le vélo sont suggérées en priorité.

Demain, ce fameux dernier kilomètre pourrait être parcouru par des drones – comme c’est déjà le cas, par exemple, pour la livraison de nourriture à Reykjavik, la capitale islandaise, depuis 2017 – ou des véhicules autonomes. Si leur terrain de jeu à l’heure actuelle se situe plutôt dans les entrepôts pour optimiser et fluidifier la préparation des commandes, des essais sont en cours, notamment aux États-Unis où Walmart s’apprête à tester la livraison sans chauffeur dans plusieurs villes, en collaboration avec un spécialiste de l’intelligence artificielle (Argo AI).

Lorsque l’omnicanalité devient l’alliée d’une consommation plus responsable

Autre piste pour décarboner : l’essor de l’omnicanal par la progression du « phygital », soit les points de vente physiques incluant des technologies digitales. Filtres en réalité augmentée, e-shops intégrés (pour passer commande en ligne depuis les rayons du magasin) et magasins automatisés ou autonomes connaissent une progression rapide depuis la crise sanitaire, assure Terry Lobel en évoquant également l’émergence de « supermarchés virtuels » dont les rayons seraient organisés en fonction des préférences individuelles de chacun.

Au-delà des contraintes liées à la crise sanitaire, ces transformations sont aussi pour les retailers l’occasion de répondre à une volonté, largement partagée parmi les citoyens, de reprendre le contrôle de leurs achats tout en favorisant une consommation responsable. Une tendance forte qu’attestent certaines études : selon le 14ème Baromètre de la Consommation Responsable réalisé en mars 2021, 72% des Français ont modifié leurs pratiques du quotidien pour réduire l’impact de leur consommation.

Ainsi, grâce à la transformation des habitudes de consommation de ses clients, le retail trouvera-t-il de nouveaux leviers de croissance en cherchant à être plus vertueux ? L’économie circulaire réussira peut-être le tour de force de réconcilier retailers, consommateurs et environnement…

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