Au Mali, en plus de la CEDEAO , la pression s’ajoute sur la junte

Written by moonsjok

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janvier 13, 2022

La France, l’AlgĂ©rie et les États-Unis ont ajoutĂ© mardi Ă  la pression exercĂ©e par les Etats ouest-africains sur la junte malienne pour qu’elle se plie Ă  l’exigence d’un retour rapide des civils au pouvoir.

La junte, elle, tente de rallier les Maliens autour d’un discours patriotique et les appelle Ă  manifester vendredi contre les sanctions infligĂ©es par la CommunautĂ© Ă©conomique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CĂ©dĂ©ao).

La Cédéao a décrété dimanche la fermeture des frontiÚres avec le Mali et un embargo commercial et financier, sanctionnant durement le projet de la junte de continuer à diriger le pays pendant plusieurs années.

L’effet de ces mesures de rĂ©torsion sur la junte, mais aussi sur la population, ajoutent Ă  l’incertitude des lendemains dans un pays au coeur de l’instabilitĂ© sahĂ©lienne, thĂ©Ăątre de deux putschs depuis 2020.

La France et les Etats-Unis, importants partenaires du Mali, ont pris le sillage de la CĂ©dĂ©ao. Le prĂ©sident Emmanuel Macron a assurĂ© que la France et l’Union europĂ©enne, dont son pays assure la prĂ©sidence tournante, soutenaient la “position trĂšs claire et ferme” de la CĂ©dĂ©ao face aux “dĂ©rives de la junte”.

Les Européens se préparent à renforcer à leur tour leurs sanctions, a-t-il dit.

Mais un texte du Conseil de sĂ©curitĂ© de l’ONU soutenant les sanctions de la CĂ©dĂ©ao, proposĂ© par la France, a Ă©tĂ© bloquĂ© mardi par la Russie et la Chine.

Le ministre français des Affaires Ă©trangĂšres Jean-Yves Le Drian a quant Ă  lui accusĂ© mardi les mercenaires du groupe russe Wagner de “soutenir” la junte au pouvoir au Mali sous couvert de lutte antijihadiste.

“Ce qui se passe au Mali est une vĂ©ritable fuite en avant de la junte au pouvoir qui, au mĂ©pris de ses engagements, souhaite confisquer le pouvoir pendant des annĂ©es et priver le peuple malien de ses choix dĂ©mocratiques”, a-t-il ajoutĂ©.

Les Etats-Unis soutiennent Ă©galement les sanctions ouest-africaines, a dit leur ambassadrice Ă  l’ONU, Linda Thomas-Greenfield, lors d’une rĂ©union du Conseil de sĂ©curitĂ©.

Un dĂ©lai de cinq annĂ©es, comme l’ont demandĂ© les colonels pour passer la main aux civils, “prolonge la douleur” des Maliens, plongĂ©s dans une profonde crise sĂ©curitaire et politique depuis le dĂ©clenchement d’insurrections indĂ©pendantiste et jihadiste en 2012, a-t-elle dit.

– Appel Ă  la raison –

Le voisin algĂ©rien, autre alliĂ© primordial, a encouragĂ© les militaires maliens Ă  “une attitude responsable et constructive”. Le prĂ©sident algĂ©rien Abdelmadjid Tebboune juge “raisonnable et justifiable une pĂ©riode de transition d’une durĂ©e ferme de douze Ă  seize mois”, ont dit ses services dans un communiquĂ©.

Les autorités maliennes font, elles, assaut de pugnacité depuis dimanche et se drapent dans la défense de la patrie et de sa souveraineté, autour desquelles elles exhortent au ralliement.

“L’heure est au rassemblement de tous les Maliens sans exclusive pour rĂ©affirmer nos positions de principe et dĂ©fendre notre patrie”, a dĂ©clarĂ© lundi soir dans un discours Ă  la Nation le colonel Assimi GoĂŻta, portĂ© Ă  la tĂȘte du Mali par un premier coup d’Etat en aoĂ»t 2020 et intronisĂ© prĂ©sident “de la transition” Ă  la suite d’un second en mai 2021.

Le colonel GoĂŻta et le gouvernement ont Ă  nouveau fustigĂ© les dĂ©cisions de la CĂ©dĂ©ao, au “caractĂšre illĂ©gitime, illĂ©gal et inhumain” selon le premier.

L’embargo imposĂ© par la CĂ©dĂ©ao, hors produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, suscite la crainte de l’inflation et de la pĂ©nurie dans un pays pauvre et enclavĂ©, Ă©prouvĂ© par les violences de toutes sortes et la pandĂ©mie de Covid-19.

Le gouvernement a accusĂ© la CĂ©dĂ©ao de s’ĂȘtre laissĂ©e “instrumentaliser par des puissances extra-rĂ©gionales”, rĂ©fĂ©rence claire Ă  certains partenaires internationaux aux premiers rangs desquels la France, engagĂ©e militairement au Sahel mais avec laquelle les relations se sont sĂ©rieusement dĂ©gradĂ©es depuis 2020.

– “Plan de riposte” –

Jusqu’Ă  mardi, trĂšs peu de voix significatives s’Ă©taient Ă©levĂ©es, au Mali mĂȘme, pour critiquer la junte.

Une coalition de partis maliens, le Cadre d’Ă©change, a rompu cette rĂ©serve en faisant porter Ă  la junte “la seule et l’unique responsabilitĂ©” des sanctions.

Epreuve de force passagĂšre ou durable, les intentions de la junte sont inconnues.

“Le Mali reste ouvert au dialogue avec la CĂ©dĂ©ao pour trouver un consensus”, a dĂ©clarĂ© le colonel GoĂŻta.

Mais ni lui ni le gouvernement n’ont pour le moment offert de perspective de sortie de crise. Le gouvernement a au contraire dit son intention d’Ă©laborer “un plan de riposte”.

Les colonels s’Ă©taient engagĂ©s en 2020 Ă  rendre les commandes aux civils au bout de 18 mois. Ils disent Ă  prĂ©sent ne pas ĂȘtre en mesure de respecter l’Ă©chĂ©ance prĂ©vue du 27 fĂ©vrier 2022 pour organiser des Ă©lections.

Ils invoquent l’insĂ©curitĂ© persistante dans le pays et la nĂ©cessitĂ© de rĂ©formes prĂ©alables pour que les Ă©lections ne souffrent pas de contestations, Ă  l’instar des prĂ©cĂ©dentes.

Par Serge DANIEL AFP  © 2022 AFP

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